Centre international de formation pour l'enseignement des droits de l'homme et de la paix


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Vues d'Afrique n° 2

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Diversité culturelle et éducation aux droits de l'homme

Par Gabriel Siakeu

 

I. Identité et diversité

Comment apprendre aux populations du monde les droits de l'homme malgré les différences culturelles propres à chaque peuple ?

L'ancien-président guinéen, Sékou Touré, disait: «L'histoire est une réalité. Elle fonde l'identité de chaque peuple, la culture de chaque peuple. Il n'y a pas de peuple sans culture, sans civilisation même si elle n'est pas écrite. Elle est la résultante du combat de chaque peuple. Tout ce qui est d'une portée sociale et historique est une valeur».

La culture est donc un indicateur de l'identité de chaque peuple car elle est un ensemble de structures sociales et de manifestations artistiques, religieuses, intellectuelles qui définissent et particularisent un groupe ou une société. S'agissant du Cameroun, véritable mosaïque d'ethnies et de langues, on peut facilement imaginer qu'il existe plusieurs éléments qui concourent à la particularisation des peuples. Énumérons, entre autres :

- les langues:

Outre les deux langues officielles du Cameroun, le français et l'anglais, on dénombre environ 280 langues dites nationales - ou traditionnelles ou vernaculaires - qui marquent la distinction entre les diverses tribus du Cameroun.

- les religions:

Les plus importantes sont le christianisme, l'islam et l'animisme. La majorité musulmane est concentrée dans le nord du pays, les chrétiens dans le sud et les animistes dans l'ouest ainsi que chez les populations des forêts de l'est.

les coutumes ou les moeurs d'un groupe:

Elles diffèrent d'une tribu à une autre.

Ces particularismes s'opposent-ils au caractère universel de la Déclaration universelle des droits de l'homme ? Peut-on entrevoir la culture dans un sens suffisamment large pour qu'elle englobe l'ensemble des spécificités culturelles? 

1.2 Universalité des droits de l'homme

La dignité et la valeur de la personne humaine ont constitué l'essence même du texte de la Déclaration universelle des droits de l'homme (DUDH) adoptée en 1948. Cette Déclaration n'a-t-elle d'ailleurs pas pour objet de favoriser le respect universel et effectif des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour tous, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion? L'importance accordée à l'égalité et à la non-discrimination renforce le caractère universel de la «culture» des droits de l'homme.

Dans cette perspective, l'éducation aux droits de l'homme se présente comme un des moyens par excellence pour illustrer les liens dynamiques et positifs existant entre les notions de pluralisme culturel, de valeurs universelles et de l'égalité entre les personnes et les groupes. Mais en vue d'atteindre un tel objectif, des obstacles doivent être levés, notamment: l'analphabétisme, la pauvreté, les coutumes et traditions culturelles discriminatoires et les régimes politiques autoritaires.

Une éducation aux droits de l'homme peut contribuer à lever ces obstacles en conscientisant les jeunes comme les adultes à la lutte pour l'égale dignité de tous les êtres humains.

II. Les méthodes d'enseignement des droits de l'homme : simplicité et accessibilité.

Les méthodes d'enseignement sont nombreuses. Elles diffèrent selon le milieu d'enseignement, les caractéristiques des enseignés et selon les enseignants.

Dans tous les cas, le message des droits de l'homme doit être simple et compréhensible pour tous. La version en langage simplifié de textes internationaux de protection des droits de l'homme (la Convention relative aux droits de l'enfant et la Déclaration universelle des droits de l'homme ) permet leur appropriation aisée.

Par ailleurs, ces instruments devraient être traduits dans toutes les langues du monde de manière à ce qu'aucune minorité ne puisse être privée de leur connaissance. À défaut, le recours à la pédagogie par illustration imagée peut contribuer à une forme d'appropriation de ces instruments internationaux. L'image étant universelle, son utilisation permet de contourner la première difficulté ci-dessus évoquée. À cet égard, l'ÉIP-Cameroun est en train d'élaborer un document intitulé La DUDH en images afin de faciliter la connaissance de cet instrument auprès des analphabètes, notamment. Les images exprimeront les réalités locales sans toutefois s'écarter du message universel contenu dans le texte.

Une autre approche, celle de «la pédagogie par l'exemple» peut s'appliquer à toutes les cultures. L'enseignant doit, en effet, prêcher par l'exemple en posant des actes non préjudiciables. Il doit être le miroir de la société. Il doit lui-même, en tout premier lieu, respecter les droits de l'homme.

Ces approches pédagogiques peuvent être soutenues par le recours aux médias dont la télévision, les journaux et la radio. Cependant, en Afrique, la télévision est rare dans les régions pauvres et l'utilisation des journaux est réservée aux personnes alphabétisées. La radio, par contre, présente un moyen simple et efficace d'échanges, à la condition que les émissions se fassent dans les langues locales des populations concernées.
 
 

III. Conclusion

L'enseignement des droits de l'homme doit s'adapter à la diversité culturelle qui caractérise les peuples de la terre. Plusieurs méthodes pédagogiques qui valorisent la personne humaine peuvent être appliquées tout en tenant compte des différences culturelles propres à chaque peuple.

L'idéal serait, comme l'a déclaré Jan Martenson, ancien Secrétaire général-adjoint aux droits de l'homme «d'établir une culture universelle des droits de l'homme dans laquelle il serait clairement déterminé que les droits de l'homme et les libertés fondamentales sont inhérents à la personne humaine, sans aucune distinction ».

Gabriel Siakeu enseigne l'histoire et la géographie au Lycée d'Ekounou et est le Président de l'EIP-Cameroun.

   

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