Centre international de formation pour l'enseignement des droits de l'homme et de la paix
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par Audrey Osier et Hugh Starkey
�*Traduit de l'anglais
Mod�les d'�ducation � la citoyennet� et � la d�mocratie
Compl�mentarit� de la vie publique et de la vie priv�e
Citoyennet� et repr�sentations sociales
Devenir acteur
L'approche minimaliste: France et Grande-Bretagne
Conclusion: vers des �coles d�mocratiques
Introduction
Notre compr�hension des droits de l'enfant a �volu� depuis un quart de si�cle. Inspir�e au d�part d'un discours ax� sur l'importance de favoriser le d�veloppement de son autonomie, cette compr�hension s'�tend aujourd'hui au domaine des droits des enfants en tant que citoyens en formation. Cette reconnaissance des droits civils et politiques des enfants trouve son expression dans la Convention relative aux droits de l'enfant, adopt�e par les Nations Unies en 1989.
L'�ducation est affaire de formation des citoyens qui ont leur mot � dire aussi bien en ce qui concerne leur pr�sent que leur avenir. C'est un processus donnant les moyens d'acc�der � des connaissances, d'acqu�rir des comp�tences et les qualifications n�cessaires � la vie future. Ce processus en est un de transmission culturelle, permettant par l� d'associer le pass� au pr�sent et au futur. Il est un gage d'int�gration des jeunes dans la soci�t�.
Qui dit �ducation � la citoyennet� dit �ducation � la d�mocratie. Cette affirmation trouve �cho dans la recommandation de l'Assembl�e parlementaire du Conseil de l'Europe relative � une strat�gie europ�enne pour les enfants, adopt�e en janvier 1996. � ce sujet, Jeleff (1996:106) souligne que le respect des droits, des int�r�ts ainsi que des besoins des enfants est une priorit� politique. On ajoute que l'Assembl�e est persuad�e que le respect des droits des enfants ainsi qu'une plus grande �galit� entre ces derniers et les adultes contribueront � pr�server l'entente entre les g�n�rations et participera au d�veloppement d�mocratique.
La d�mocratie renvoie aux questions d'�galit�, de participation et de repr�sentation. Elle suppose �galement une volont� d'ouverture, de transparence et de responsabilisation (Wright::1994). Ces �l�ments peuvent �tre pris en compte par le curriculum classique, mais ils commandent, par ailleurs, la mise en place de structures de soutien diff�rentes de celles fond�es sur une notion d'autorit� hi�rarchique. D'autant que c'est au plan de l'�ducation � la citoyennet� qu'�ducation et politique se rejoignent ouvertement. D'aucuns, parmi le corps enseignant, pourraient trouver cette approche fort inconfortable.
D'autre part, on peut observer que l'�ducation � la citoyennet� et � la d�mocratie n'est pas exempte de critiques. Mais notre exp�rience nous a montr� que la r�ussite de cette �ducation est directement proportionnelle � la qualit� du programme offert, au soutien de l'institution et aux choix de m�thodes p�dagogiques adapt�es. Le succ�s de cette �ducation d�pend non seulement de la qualit� des contenus formels, mais aussi du d�veloppement de comp�tences �thiques. En outre, un parti-pris pour la transparence permet de sortir des orni�res r�sultant des contradictions du double registre curriculum r�el/curriculum cach� dans lequel navigue souvent le personnel de l'�cole.
La d�mocratie est un id�al. En cons�quence, m�me la �plus d�mocratique� des soci�t�s n'est pas dispens�e de progr�s. Comme Held (1995) l'�crit, le trait distinctif de la d�mocratie ne se limite pas � une s�rie de proc�dures � suivre (aussi importantes que ces derni�res puissent �tre) car il se caract�rise aussi par la poursuite des valeurs d�mocratiques, ce qui sugg�re un �largissement de la participation dans le processus d�mocratique.
L'�ducation des futurs citoyens n'est pas vue comme une priorit� dans l'enseignement et, d'ailleurs, le curriculum y consacre peu de place et de temps. Mais nous devons tous pourtant nous pr�parer � affronter l'injustice et les pr�jug�s. Et il existe diff�rentes mani�res de former les enseignants � se pr�parer � faire face � de telles situations (Osler et Starkey: 1996). Dans cet esprit, nous proposons, dans les lignes qui suivent, une analyse �valuative de mod�les d'�ducation � la citoyennet� bas�s sur des principes propres aux droits de l'homme. Nous examinerons �galement quelques critiques des pratiques actuelles ainsi que les effets de l'application des principes d�mocratiques au sein des institutions �ducatives.
Mod�les d'�ducation � la citoyennet� et � la d�mocratie
Il existe plusieurs mod�les d'�ducation � la citoyennet� ainsi que de nombreuses descriptions d'approches � privil�gier dans ce domaine (voir, par exemple: Baglin Jones et Jones:1992; Mougniotte:1994; Oliver et Heater:1994; Roche:1993; Rowe:1992). Au milieu des ann�es 1990, il se d�veloppe un int�r�t marqu� pour l'�ducation � la citoyennet� dans une perspective europ�enne ou mondiale (Bell:1994; Osler et al:1996; Rowan:1993; Steiner:1996). Cette �ducation traite aussi bien du d�veloppement personnel de l'�l�ve que de celui, politique et social, de la soci�t� aux plans local, national et international.
S'agissant du d�veloppement de la personne, l'�ducation � la citoyennet� s'int�resse � l'inclusion sociale. � cet �gard, l'accent est mis, notamment, sur le d�veloppement de l'engagement personnel � promouvoir l'�galit� et la justice sociale dans l'�cole comme dans la soci�t� en g�n�ral. Du point de vue socio-politique, cette �ducation vise � cr�er un ordre social assurant un climat de s�curit�, sans r�pression. Dans cette optique, il s'agit de prot�ger la d�mocratie des forces antid�mocratiques, tels le racisme structurel ou la x�nophobie, et de promouvoir les droits de l'homme comme fondements d'une soci�t� saine.
Compl�mentarit� de la vie publique et de la vie priv�eCompl�mentarit� du d�veloppement personnel aux aspects socio-politiques et culturels est clairement expos�e dans le mod�le propos� par Richardson (1996). Il fait ressortir les cat�gories suivantes: �statut, droits et obligations; �insertion sociale et participation active; �sentiment et signification de l'identit�; ��alphab�tisation� politique et habilet�s.
Sch�matisation:
Structurel/politique Culturel/personnel Minimal Droits Identit� Inclusion comp�tence
Ce mod�le sugg�re l'id�e que les droits et le sens de l'identit� repr�sentent le minimum indispensable � toute d�finition de la citoyennet�. Le sociologue Alain Touraine(1994) semble partager cette affirmation puisqu'il soutient l'id�e que la personnalit� du sujet est faite de libert� et d'identit�. Il ajoute que la premi�re ne peut fairre l'�conomie de la seconde.
Dans l'approche de Richardson, les composantes de la citoyennet� �manent, d'une part, de la sph�re publique - ou sociale- (les droits et libert�s) et, d'autre part, de la sph�re personnelle ou priv�e (identit�). L'�cole est le lieu de rencontre des valeurs personnelles et de la culture familiale et des valeurs plus g�n�rales de la sph�re publique. De par sa fonction de socialisaiton, l'�cole essaie de faciliter la participation � la sph�re publique, au le sens le plus large du terme. Les droits renvoient � la connaissance et aux exp�riences propos�es par l'�cole afin de permettre aux enfants de comprendre les structures sociales, les r�gles et les obligations dans un contexte o� ils peuvent exercer leur cr�ativit� et cultiver le sens de la r�ciprocit�.
L'�ducation � la citoyennet�, telle que nous l'entendons, se d�veloppe � l'int�rieur des sph�res du public et du priv�. Les droits de l'homme s'appliquent, en r�alit�, aussi bien � la personne qu'� la soci�t�. Par exemple, si la libert� de conscience et celle de pratiquer une religion rel�vent d'un droit reconnu, socio-politiquement parlant, la forme �ventuelle qu'elles peuvent prendre rel�ve d'une d�cision personnelle.
Citoyennet� et repr�sentations sociales
Touraine et Richardson reconnaissent tous deux que la libert�, les droits et l'identit� sont des attributs essentiels de la citoyennet�; mais celle-ci ne saurait �tre r�duite � une �allocation� de droits.
Selon Morgan (1943), l'�ducation serait le reflet des id�aux et des croyances des adultes face � leur vision du monde. Et c'est dans cet esprit qu'il est assur� � l'enfant l'environnement et les soins jug�s n�cessaires � son d�veloppement. Notre repr�sentation de la vie est donc � la base de nos pratiques �ducatives.
Nous devons cependant admettre que, dans certaines r�gions du monde, le r�le des jeunes dans la soci�t� a �volu�. Ceux-ci ont aujourd'hui la possibilit� de participer aux discussions et aux d�cisions en ce qui concerne la �raison de la vie� et l'�ducation. Dans une soci�t� d�mocratique, la transmission des valeurs permet aussi l'examen critique de ces m�mes valeurs et croyances. L'�ducation � la citoyennet� d�mocratique offre la possibilit� de fa�onner l'avenir. Ceci implique que l'occasion soit donn�e de comprendre clairement les principes qui soutiennent les repr�sentations actuelles de la soci�t� ainsi que des institutions qui la configurent.
En 1943, il s'av�rait essentiel de proposer une vision d'une soci�t� mondiale future qui contrasterait avec celle construite sur une hi�rarchie des races et sur une ob�issance aveugle � un �tat totalitaire. Cette aspiration se retrouve dans la Charte des Nations Unies. Celle-ci propose l'id�al d'une soci�t� d�mocratique ayant pour base la justice et la paix dans laquelle n'existeraient plus la peur ni le sentiment de manque. Ce serait l'av�nement d'une v�ritable communaut� de citoyens. Les nations d�mocratiques qui adh�rent aux droits de l'homme se sont engag�es explicitement � r�aliser cet id�al. Cependant, ces m�mes nations autorisent la libre expression de vues non-d�mocratiques telles le supr�matisme ethnique et racial. La �libre-circulation� de ces id�es confirme l'importance d'une �ducation � la citoyennet� d�mocratique soucieuse de faire l'examen critique des id�ologies.
Devenir acteur
Titulaires de leurs droits et de leurs identit�s respectives, les citoyens peuvent collectivement oeuvrer pour une soci�t� saine. D'o� l'inclusion de tous et de toutes dans un projet collectif.
Mais que faire si la soi-disante soci�t� d�mocratique refuse de reconna�tre le droit � la participation de certaines cat�gories de citoyens? Il se trouve que dans de �vieilles� d�mocraties une grande partie de la population se voit exclue du processus politique. Une soci�t� non d�mocratique peut toujours utiliser la r�pression pour contr�ler ses citoyens ou sujets. Mais ce que Schnepper (1994) appelle "une communaut� de citoyens" ne peut survivre qu'en consentant des efforts conscients et continus pour renforcer sa d�mocratie et de l'�tendre � tous sans exclusives. L'�ducation � la citoyennet� suppose non seulement une participation personnelle dans la communaut�, mais aussi un engagement, en tant qu'acteur responsable, � prot�ger la d�mocratie communautaire elle-m�me.
Composantes de l'�ducation � la citoyennet�
Pour pouvoir profiter de leurs droits, les citoyens doivent d'abord en conna�tre l'existence. Il est donc indispensable de fournir une formation de base en mati�re de droits de l'homme. Cependant, les droits n'ont d'existence r�elle que lorsqu'ils sont exerc�s, dans un contexte d�mocratique de justice sociale et dans une soci�t� vivante et active. Dans cet esprit, nous avons �largi le mod�le de Richardson tel qu'il se pr�sente maintenant ci-apr�s.
Tableau I: Les quatre composants de la citoyennet�
structurel/politiqueculturel/personnel DroitsIdentit�s connaissance des droitsou/ou tensions � Approched�mocratieet/et �tat hybride � Minimalistenon-discrimination soci�t� civile (ex.: ONG) �duc. Citoyennet�Sentiments/choix InclusionComp�tences Approche Maximalisterevenu de base
S�curit�
participationpolitiques communicativesSoci�t� saineAction �cole saineFormation
Chaque personne, chaque citoyen adopte de multiples identit�s. Comme nous l'avons d�j� fait remarquer, il existe une double dimension de la notion d'identit� (Osler et Starkey: 1996). Nous nous identifions � certains groupes auxquels nous avons le sentiment d'appartenir tels la famille, la profession, la nationalit�, la classe sociale ou la culture. Nous nous distinguons des groupes auxquels nous n'avons pas envie de nous identifier. Notre identit� est donc bas�e, dans cette mesure, sur une tension constante entre le �nous� et �ce qui n'est pas nous�. Dans le tableau ci-haut, nous exprimons cette tension par "ou/ou".
Par ailleurs, l'�ducation est un processus qui nous permet d'acqu�rir d'autres identit�s et de nous associer � des communaut�s plus larges. L'�ducation en mati�re de droits de l'homme, en raison de son caract�re insistant sur une humanit� partag�e et sur l'�galit� en droits, nous permet de d�velopper ces identit�s �cumul�es� (et/et). Nous pouvons faire partie d'un groupe linguistique, culturel ou religieux exclusif et en m�me temps participer � une entit� inclusive comme une nation d�mocratique. Nous pouvons �tre Catalan et Espagnol, Juif et Fran�ais, venir du Yorkshire et, simultan�ment, se r�clamer de l'Europe. C'est ce que nous appelons �l'�tat hybrid�. Tout effort tendant � faire correspondre l'identit� ethnique � l'identit� nationale peut nous conduire sur les sentiers de la la purification ethnique, voire m�me du g�nocide.
L'approche minimaliste: France et Grande-Bretagne
Selon le mod�le de Richardson, il y a deux exigences minimales � la citoyennet�: une connaissance des droits de l'homme et le d�veloppement de l'identit�. L'apprentissage des droits appara�t comme une condition minimale d'�ducation � la citoyennet�.. Toutefois, cet apprentissage ne saurait �tre uniquement d'ordre cognitif. � cet �gard, les programmes limit�s � des contenus formels et � des �num�rations de droits se sont rev�l�s singuli�rement insuffisants. Il faut cependant retenir qu'encore aujourd'hui de telles m�thodes sont encore tr�s r�pandues en France, bien que des projets parall�les financ�s par l'�tat ainsi que nombre de projet locaux t�moignent de meilleures approches. Dans une �tude r�alis�e en r�gion Rh�ne-Alpes, en France, Roche (1993) fait �tat des limites d'une �ducation � la citoyennet� selon l'approche que nous avons qualifi�e de minimaliste. Pour des parents, dont le t�moignage est relat� dans cette �tude, l'�ducation � la citoyennet� telle que donn�e dans des �coles fran�aises constituerait un exercice particuli�rement ennuyeux et sans liens avec la vie quotidienne. Dans un best-seller pol�mique, o� il s'attaque aux lacunes de l'�ducation formelle en France, de Closets (1996) ne manque pas de souligner les lacunes de l'�ducation civique. S'en prenant notamment aux manuels scolaires, le pol�miste qualifie ceux-ci d'abstraits et r�barbatifs pour de jeunes lecteurs.
En Grande-Bretagne, l'�ducation � la citoyennet� appara�t mal structur�e, impopulaire aupr�s des �l�ves et des enseignants et infantilisante. Pourtant, comme le souligne Stevens (1982), les enfants sont capables de bien plus que ce qu'on leur enseigne. D�s l'�ge de 9 � 10 ans, ils seraient en mesure de discuter d'enjeux politiques et de participation citoyenne. L'auteure voit l'apprentissage politique chez les enfants comme �tant en lien �troit avec l'adoption d'une identit� sociale. Elle insiste notamment sur la n�cessit� d'une �ducation politique permettant aux enfants de comprendre le monde et de participer aux d�bats.
Mais en d�pit du fait que l'�ducation �politique� � la citoyennet� soit possible, la r�alit� reste extr�mement d�cevante. Une enqu�te du Conseil pour la Recherche �conomique et sociale faisait d'ailleurs observer que la majorit� des jeunes de 16 � 18 ans pouvaient �tre consid�r�s comme politiquement analphab�tes. Une �tude majeure conduite en Grande-Bretagne au d�but des ann�es '90 conclut en la faillite du syst�me �ducatif en mati�re de pr�paration des jeunes � la vie politique. � ce sujet, des auteurs (Banks et al:1992:187) font remarquer que le curriculum devrait prendre en consid�ration la formation politique des jeunes � l'�cole.
Une autre enqu�te, r�alis�e en 1994, � la demande de l'oeuvre charitable Barnardos, montre l'importance d'une �ducation �politique� � la citoyennet�, compte tenu des repr�sentations sociales contradictoires des jeunes face � des enjeux sociaux importants. En effet, cette enqu�te a r�v�l� que 59% des jeunes britanniques de 12 � 19 ans s'int�ressaient peu, ou pas du tout, � la politique et que seuls 20% d'entre eux soutenaient un parti politique. Mais en revanche, la pauvret�, le crime et les probl�mes raciaux �taient au nombre de leurs pr�occupations principales cependant que 80% d'entre eux croyaient qu'une diminution du nombre de pauvres r�duirait le taux de criminalit�. Un nombre significatif n'avait que peu de foi dans le syst�me judiciaire et les deux tiers croyaient qu'un pauvre courait plus de risques qu'un riche d'�tre condamn� pour un crime qu'il n'avait pas commis. Plus de 40% croyaient aussi qu'un Noir risquait davantage qu'un Blanc d'�tre condamn� alors qu'il �tait innocent.. Fait � noter: 28% ont reconnu avoir certains pr�jug�s raciaux. (Roberts & Sachdev:1996).
Le politique et l'�cole
La peur de la politique dans les �coles
Bien que les jeunes semblent peu s'int�resser aux questions politiques traditionnelles, leur int�r�t pour des questions politiques et civiques actuelles est, en revanche, plus marqu�. Pour l'�cole, le d�fi � relever consiste � tirer profit de cet int�r�t en donnant aux jeunes les moyens de d�velopper des outils leur permettant de traiter ad�quatement de ces questions. Il est cependant indispensable que les enseignants soient d'abord form�s � exercer ce r�le. Comme le signale Roche(1993), la prise en consid�ration de questions politiques � l'�cole soul�ve des difficult�s aux yeux des enseignants. Ceux-ci paraissent souscrire � l'id�e en m�me temps qu'ils estiment que cette approche est risqu�e. L'h�sitation invite au retranchement dans un enseignement formel, descritif et abstrait. D'autres facteurs expliqueraient les lacunes de l'�ducation aux droits de l'homme. Prenant exemple de la France, Roche en cite trois: le manque de temps ou le sentiment qu'il vaut mieux utiliser celui-ci pour l'enseignement de mati�res formelles; le fait qu'il n'existe pas d'examen dans cette mati�re; la difficult� de se repr�senter l'�cole comme une communaut�.
L'�cole en tant que communaut� de citoyens
Pour Schnapper(1994), une nation d�mocratique est "une communaut� de citoyens" li�s par leur participation aux institutions d�mocratiques. La nation serait essentiellement une structure transcendante d'institutions politiques � l'int�rieur desquelles existent et se d�veloppent un nombre et une vari�t� de groupes. Chaque nation d�mocratique, rappelle l'auteure, est singuli�re pour des raisons historiques. Mais dans tous les cas, elle se fa�onne autour d'une tension �manant du d�sir d'�difier un cadre citoyen formel et abstrait et de la n�cessit� d'�tablir des liens entre les citoyens. Mais ce dernier aspect ne serait actualisable que dans une perspective communautarienne ou ethnique, autrement dit: en ligne directe avec les personnes et sans n�gliger le rapport aux �motions.
Comme nous l'avons �voqu� dans le tableau ci-haut, les droits sont �formels et abstraits� alors que l'identit� est �directe et �motionnelle�. Cette tension se trouve au coeur de l'id�e m�me de la nation d�mocratique. L'�tat de citoyen se situe dialectiquement entre le civique et l'ethnique dans un effort d'aller au-del�, de transcender l'ethnique par le civique, ou de s'arracher de l'ethnique gr�ce au civique.
La nation d�mocratique fournit un cadre abstrait dans lequel les relations sociales peuvent �tre g�r�es. Elle proc�de d'une compr�hension partag�e et d'une acceptation r�ciproque des valeurs de base. Les droits de l'homme et les Constitutions nationales constituent le minimum acceptable au plan de ces valeurs. Celles-ci doivent �tre suffisamment g�n�rales pour permettre aux individus d'�tre cr�atifs et de s'exprimer afin qu'aucun groupe ne se sente menac� dans son identit� essentielle. D'un autre c�t�, ces valeurs doivent '�tre assez solides pour r�sister aux attaques des id�ologies non-d�mocratiques qui tenteront d'influencer l'�quilibre des structures politiques en leur faveur.
Schnapper croit que les �coles sont potentiellement des mod�les d'inspiration pour une nation d�mocratique. En cela, la pens�e de l'auteure s'apparente � celle de Dewey(1909) qui soutenait l'id�e qu'il ne saurait y avoir un ensemble de principes �thiques bons pour l'�cole et d'autres valables essentiellement pour ce qui se passe � l'ext�rieur de celle-ci. Toujours selon Schnapper, notre repr�sentation de l'�cole est impersonnelle et formelle. En d�finissant l'�cole comme une communaut�, les enfants comprendraient mieux la nation politique et sentiraient qu'ils en font partie. Si ce mod�le peut s'appliquer � ce microcosme qu'est l'�cole, posons l'hypoth�se qu'il devrait �tre possible de le transposer dans la soci�t� �largie.
Conclusion: vers des �coles d�mocratiques
Une �cole d�mocratique est une �cole qui est responsable et dans laquelle les structures sont transparentes. Les �coles du secteur public sont redevables vis-�-vis de l'�tat ou de l'autorit� locale qui les finance, des parents qui leur confient leurs enfants et des enfants eux-m�mes. Ceci suppose que les �l�ves, les parents et la communaut� comprennent les objectifs de l'�cole et que ces objectifs aient �t� explicit�s, que les membres de la communaut� scolaire aient �t� impliqu�s dans leur d�finition et leur acceptation.
Le projet D�velopper l'Ecole pour la D�mocratie en Europe en est venu � la conclusion qu'une politique et une pratique de l'inclusion supposent une coh�rence, non seulement dans les syst�mes et les structures, mais aussi dans les attitudes et les approches. � cet �gard, les �coles doivent expliciter leurs valeurs et leur impact sur les relations sociales et les structures de fa�on � ce que le curriculum cach� soit moins cach�... Ces �coles peuvent ainsi encourager le respect et l'estime de soi ainsi que la connaissance des autres(DSDE: 1993).
Le but de toute �ducation devrait �tre de construire un monde de justice sociale et de paix, dans l'esprit de la D�claration universelle des droits de l'homme. Pour construire cet avenir meilleur, l'�cole d�mocratique doit reconna�tre le droit de tout enfant d'avoir acc�s et de participer � tous les aspects de la vie scolaire. Elle doit �galement contribuer � mettre en valeur la diversit� culturelle et se montrer ouverte devant les changements et les d�bats socio-culturels et politiques. C'est le sens � donner � une �cole communautaire et responsable.
R�f�rences
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� CIFEDHOP 2008